Il est parfois des livres qui vous tombent sur le nez, que vous n’attendiez pas, et qui, vous ouvrant leur petits bras, vous invitent à l’aventure.
Et c’est ainsi que je fis connaissance de La Dernière Tentation de Judas, par Philippe Battaglia, dont Matthieu de l’Atalante ne tarissait (et ne taris toujours pas !) d’éloges. Alors ni une ni deux, je me dis… « oh, un jour peut-être ».
Non, c’est plutôt à l’Astrolabe à Rennes que j’ouvrais ledit ouvrage pour en découvrir un extrait.
C’était le dernier jour de la semaine ; seule une femme se lamentait face à l’énorme pierre qui obstruaient l’entrée du caveau. Soudain, il y eut un formidable tremblement de terre et la pierre gigantesque roula sur elle-même, libérant le passage à Jésus, vivant.
– Ben, ça, Merde alors ! s’exclama la femme.
– Langage, Marie, langage, la réprimanda Jésus en s’approchant d’elle à pas agiles.
J’ai ri, j’ai reposé le livre, et j’ai foncé à l’Atalante dès que possible pour m’en récupérer une copie.
Résumé officiel
Rome, de nos jours. Immortel et séparé de Jésus depuis quelque deux mille ans, Judas trouve enfin une raison de sortir de sa léthargie : réaliser une ancienne prophétie. Après la découverte d’un évangile apocryphe écrit par Satan lui-même, il part à la recherche des trente deniers payés par les Romains pour la dénonciation de son amant, fort de la promesse que cela lui permettra de le retrouver dans l’au-delà. Alors, le monde saura qu’il n’était pas le traître dépeint par tous.
Accompagné d’une partie des apôtres, combattu par les autres, aidé par Marie de Magdala et Lazare, sa quête aux accents de thriller religieux le bringuebale des sphères huppées de Wall Street aux basfonds de Londres, du tombeau maltais de Jean de Valette au Vatican à la botte d’un Pierre, qui n’a de saint que le nom.
Philippe Battaglia peint, dans un esprit résolument punk, une galerie de personnages et d’histoires au cœur de notre imaginaire collectif. Drôle et érudite à la manière de Terry Pratchett, cette apocalypse survitaminée bouscule notre vision des apôtres.
Après tout, la Bible, c’est de la pop-culture.
😍 Mon avis
🎤 « Alors c’est l’histoire de Judas, en fait, c’est le mec de Jésus, il l’a pas vraiment trahi, donc il va aller péter la gueule à Dieu pour se venger avec l’aide de ses copains apôtres immortels ». À quel MOMENT un éditeur dit let’s go à un pitch pareil ? Eh bien, c’est arrivé, grâce à Philippe Battaglia et à l’Atalante. Et on peut les remercier !
🤣 Déjà parce que nous avons entre les mains un texte fondamentalement drôle et décalé, impertinent sans être provocant1 non plus (allez juste un peu…). Citons le pape fantoche, marionnette d’un Saint-Pierre en roue libre2 qui campe les pires positions de l’Église telle qu’on la connaît, un commando de justiciers apostoliques aussi dangereux que surprenant, propices à des scènes de baston dignes de John Woo ou de Tarantino, le tout parsemé de punchlines parfaitement placées… Encore !!!
☮️ Ensuite parce que l’auteur en profite pour s’approprier l’histoire de Jésus pour en faire un messie ô combien progressiste3, particulièrement attaché à corriger les dérives patriarcales qu’il observe en son temps4. M’est avis qu’avec une Bible écrite sur ce modèle, on aurait eu largement moins d’emmerdes !
👪 Philippe Battaglia n’en oublie pas pour autant ses personnages secondaires : On aime s’attacher au « Peuple de la Rue », sympathique bande de sans-abris qui ne transigent pas sur la solidarité. Un peu cliché, certes, mais propice là encore à de jolis petits moments d’émotion, et toujours avec ce petit décalage humoristique de qui n’en a, je cite, « Rien à Foutre. » Sans oublier madame Ronchoud et ses amis, peut-être pas si inoffensifs…
📚 Et puis tout cela est richement documenté. Pour ma part, j’en ai profité pour aborder (ou réviser !) le mythe de la création, l’histoire d’Abel et Caïn, et puis évidemment, l’histoire de Jésus, ses apôtres suppliciés et d’autres personnages impliqués dans la vie de Brian… de Jésus, pardon. Et, bien sûr, les différents cavaliers de l’apocalypse et leur lien avec les péchés capitaux. De quoi savoir à peu près de quoi ça cause, la Bible, sans avoir à se la farcir5. Sans oublier d’autres évènements historiques, mais je vous laisse découvrir par vous-même 😉
😍 Drôle, mais pas que, non dénué d’action, d’aventure et d’émotions, le tout saupoudré de progressisme et de punchlines à mourir de rire, c’est donc une lecture fort recommandable qui saura réveiller votre bibliothèque avec ce très divin jaune flashy… Foncez, vous ne regretterez pas le chemin.
✝️ De croix. Aha. Ah.6
Livre validant le défi lecture des mordu.e.s 2025 pour la catégorie #H1G2, un livre qui vous a fait vous sentir joyeux. Parce que le rire c’est la joie, la joie, c’est l’amour, l’amour, c’est la paix, et la paix… bah, c’est mieux que la guerre.
Notes de bas de page
- Sauf si t’es Christine Boutin, son mari ou leur grand-père. ↩︎
- Et une Pierre en roue libre, si elle est bien ronde, ça fait une belle inertie. ↩︎
- Est-ce que Jésus, c’est de droite ou de gauche ? vos réponses en commentaire. ↩︎
- Avec des moyens que l’on jugera à l’aune de leur contexte, parfois ^^ ↩︎
- Est-ce plus ou moins indigeste que Lovecraft ? Vos réponses en commentaire, mais laissez-moi préparer le popcorn. ↩︎
- Ce jeu de mot est une vraie plaie. D’Égypte. ↩︎